Même si nous la dégustons tout au long de l’année, l’huître de Bretagne a sa propre Histoire avec des caractéristiques bien particulières parfois méconnues mais aux multiples bienfaits et facettes qu’il est bon de connaître. Cette « Star » des gastronomes possède en sa coquille de multiples atouts dont Cancale, en Côte d'Émeraude, Capitale de l’Huître en France depuis François 1er, et inscrite au patrimoine culturel immatériel de l’Unesco grâce à son savoir-faire en matière d’ostréiculture.

Huître de Bretagne, une Histoire au fil des siècles

L'histoire des huîtres en Bretagne-Nord remonte à la nuit des temps. De la Préhistoire à l’Antiquité, on la retrouve dès le VIe siècle dans les fastueux banquets de l’Empire romain, où l'huître plate de Bretagne avait déjà conquis une place de choix dans les menus. Importées par Rome depuis les côtes bretonnes lors des invasions en Gaule, ces délices marins ont traversé les âges. Un parcours parfois tumultueux, qui au fil des siècles, s’est toujours invitée à la table des plus fins gastronomes. Même si leur présence s'est estompée au cours du Moyen Âge, on la retrouve sous le règne de Louis XIV où l'huître retrouve ses lettres de noblesse, au point que le monarque en faisait sa pitance matinale. Au XVIe siècle, François Ier lui-même, épris de gastronomie, ne tarissait pas d'éloges sur l'huître de Cancale, contribuant à rehausser son statut. Le port et les côtes bretonnes deviennent alors le cœur battant de cette industrie florissante. Des étendues d'élevage s'étendent des baies de Saint-Malo et de Saint-Brieuc jusqu'aux côtes du Trégor et à la rade de Brest. Cependant, la frénésie d'exploitation au XVIIIe siècle engendre une surexploitation des ressources, menaçant la pérennité des bancs d'huîtres plates. Un édit royal intervient alors, interdisant la pêche du 1er avril au 31 octobre pour permettre la régénération de ces précieuses populations marines.

Alors que les premiers conchyliculteurs utilisaient des coquilles d'huîtres disposées le long du rivage pour favoriser le développement des larves, c’est grâce à Victor Coste, médecin naturaliste au service de Napoléon III et de Ferdinand de Bon, commissaire de la Marine, que les prémices de l’ostréiculture moderne ont vu le jour au milieu du XIXe siècle. Leur méthode révolutionnaire, axée sur la restauration des bancs d'huîtres plates décimés par une surpêche, introduisit l'utilisation de collecteurs dédiés à la récupération des larves, instaurant ainsi un contrôle plus efficace du cycle de croissance et de récolte.

De nos jours, les techniques d'élevage évoluent, accompagnées par le perfectionnement des outils d'exploitation et par une volonté permanente des jardiniers de la mer à s’assurer du respect des écosystèmes marins et de l’environnement (voir vidéo ci-dessus). Ce développement marque une nouvelle ère pour l'huître de Bretagne-Nord, assurant sa préservation et son rayonnement pour le plus grand plaisir des gastronomes.

Huître de Bretagne, un merroir d'exception

Les huîtres en Bretagne révèlent une diversité captivante en douze crus distincts, s'étendant de la majestueuse baie du Mont-Saint-Michel avec Cancale à la rade de Brest en passant par Paimpol, Tréguier, Arguenon, Fresnaye, Morlaix-Penzé, rade de Brest, les Abers, , offrent un éventail exceptionnel de terroirs propices à l'élevage de ces délices maritimes.

Tel un vignoble ou en l'assemblage d'un vin avec ses multiples cépages, chaque cru d'huîtres, reflet fidèle de son terroir, dévoile des caractéristiques singulières, offrant ainsi une palette de saveurs uniques aux fins gastronomes.

Ainsi, les ostréiculteurs, ces jardiniers de la mer, maîtrisent l'art minutieux de l'élevage des huîtres en Bretagne. Leur métier exige une expertise rigoureuse, de la pose des collecteurs pour capturer les larves jusqu'au délicat processus de demi-élevage, guidant la croissance des jeunes huîtres.

Gardien des écosystèmes marins, respectueux de l’environnement et de la qualité des eaux dont ils dépendent, les ostréiculteurs cultivent ces joyaux marins pendant trois à quatre ans, veillant à chaque étape pour offrir aux amateurs des produits d'une qualité exceptionnelle.

Un métier de passion aux multiples exigences

Tout au long de l’année, au fil des marées et jusqu’à la récolte, les ostréiculteurs Bretons travaillent les huîtres avec passion et patience pour les amener à maturité sur nos tables et plus particulièrement à la veille des fêtes de Noël. Pour ce faire, ces "paysans de la mer" collaborent de près avec la nature dans un processus d’élevage complexe.

La première méthode, l'élevage "à plat", consiste à placer les huîtres directement au sol, offrant un contact direct avec leur environnement marin. La seconde, l'élevage "en surélevé", repose sur des poches grillagées fixées sur des tables métalliques, préservant ainsi les huîtres des prédateurs et les élevant au-dessus du fond marin, favorisant leur croissance. Enfin, l'élevage "en eau profonde" implique la dispersion des huîtres dans des parcs à une profondeur de 10 mètres, une méthode qui favorise également leur développement.

Bien que diverses, la culture "en surélevé" sur des tables ostréicoles demeure la pratique la plus répandue, alliant tradition et efficacité dans les processus d'élevage.

Le processus commence par le captage estival des larves d'huître en mer, une étape initiale cruciale. En début de saison estivale, des collecteurs tels que des tubes ou des coupelles sont déposés sur les tables ostréicoles pour accueillir naturellement les larves. En neuf mois, ces larves se transforment en naissain, atteignant une longueur de 2 à 4 centimètres.

Au printemps, vient le temps du détroquage du naissain et du demi-élevage. Le naissain est minutieusement détaché des collecteurs. Pour les huîtres élevées « en surélevé », les jeunes spécimens sont placés dans des poches ostréicoles fixées sur les tables. Après une année, ces huîtres se développent en taille.

L'année suivante, ces jeunes huîtres sont déplacées des parcs ostréicoles pour réduire la densité des poches, puis y retournent pour une troisième année de croissance. Au cours de cette période, elles peuvent continuer à grandir pendant quelques mois supplémentaires. Ces huîtres jusqu’à la récolte sont régulièrement retournées pour garantir un développement uniforme et arrondi de leur coquille, une pratique essentielle pour leur qualité et leur forme. En moyenne, il faut 3 à 4 ans avant qu'une huître s'invite à notre table. 

L'attention portée à chaque étape du processus témoigne du dévouement des professionnels de l'ostréiculture en Bretagne, où le mariage subtil entre tradition, respect des écosystèmes marins et innovation permet d'obtenir des huîtres de qualité supérieure, convoitées par les connaisseurs.

Entre huître plate ou creuse, que choisir ?

L'huître creuse prédomine sur les 2 470 km de côte bretonne ainsi que sur les divers littoraux français. Aujourd’hui, elle est la plus courante variété parmi celles cultivées en France. Cette catégorie d'huîtres (26 700 tonnes produites par an pour la Bretagne) est couramment servie dans nos repas et est identifiée sous le nom de la Crassostrea gigas dite huître japonaise. Parmi les spécimens d'huîtres creuses, on peut distinguer les fines de claires et les spéciales. Ainsi, il convient de noter que la saveur des huîtres est influencée par les conditions environnementales et la qualité de l'eau. 

Quant à l'huître plate,  de l'espèce Ostrea edulis connue sous le nom de Bélon, elle est affinée à l’embouchure des estuaires. Cette Reine des Huîtres, originelle de Bretagne, se distingue par son goût marqué en iode, sa chair délicate mêlant subtilement des saveurs d'algue et de noisette relevées par une note minérale délicate.  Moins courante que la variété creuse, elle est généralement un peu plus onéreuse.

En Bretagne, dans la baie du Mont-Saint-Michel près de Cancale, se trouve le principal centre de production d'huîtres plates, assurant plus de 90 % de la production nationale. Quelques autres éleveurs pratiquent également cette culture sur des zones spécifiques, mais leur production demeure modeste en comparaison. En moyenne, environ 1 400 tonnes sont récoltées chaque année, ce qui en fait un produit rare apprécié par les fins gourmets.

Selon la coutume, l'huître plate est habituellement présentée dans des bourriches rondes, tandis que les huîtres creuses sont disposées dans des bourriches rectangulaires.