Bonjour Florent !

Florent Binon | Bonjour !

École Zhong Lì : la vidéo

On arrête le suspens. Vous allez nous parler de médecine chinoise puisque vous êtes co-directeur de l'École Zhōng Lì, qui forme les praticiens professionnels à la médecine chinoise. Pour les plus novices d’entre nous, vous pourriez peut-être nous expliquer en quelques mots, même si c’est assez compliqué j’imagine, ce que c’est la médecine traditionnelle chinoise ?

F B | La médecine chinoise est une médecine à part et à part entière. Elle se base sur une observation de la nature, une observation du vivant qu’elle considère dans son ensemble. L’être humain, vivant dans la nature, est donc fait à son image. Et donc, tout comme sur terre, nous pouvons observer les fleuves et les rivières qui s’écoulent, nous allons retrouver le même fonctionnement au sein de l’être humain, même circulation, à travers de ce qu’on appelle les méridiens, les canaux où l’énergie, le qì, le sang, les liquides vont pouvoir s’écouler, parcourir l’ensemble de l’organisme, relier les différentes structures entre elles, assurer le lien, mais également l’intégrité de l’être humain tant au niveau physique que psychique. En médecine chinoise, il est possible d’agir et d’intervenir sur ces méridiens et canaux afin de permettre une circulation libre et harmonieuse et d’équilibrer l’ensemble des structures de l’organisme.

Vous, comment vous êtes arrivé à devenir praticien et à ouvrir votre école ?

F B | J’ai commencé les études de médecine chinoise il y a plus de 20 ans maintenant. Lorsque j’avais 15 ans, je suis « tombé » dans la médecine chinoise et j’ai véritablement commencé mes études à l’âge de 18 ans. Puis, à force d’étudier et de pratiquer la médecine chinoise, j’ai commencé à enseigner au sein de l’école où j’ai été formé, l’école Lümen. Les co-directeurs de cette école, m’ont/nous ont encouragés avec deux autres collègues à l’époque, à créer notre propre structure. C’est pour cela que nous avons créé il y a maintenant 7 ans, l'École Zhōng Lì qui forme des praticiens en médecine chinoise, en médecine traditionnelle chinoise comme on a l’habitude de dire en Occident.

Vous appelez votre école, l'École Zhōng Lì. Qu’est-ce que cela veut dire ?

F B | La médecine chinoise est très vaste avec 3000 ans/ 2500 ans d’expérience clinique. Donc, on ne devrait peut-être pas parler d’une médecine chinoise mais des médecines chinoises.

Certains médecins à travers les siècles, se sont orientés dans une direction spécifiquement. Au moment où nous avons voulu créer l'École Zhōng Lì, nous nous sommes dit, avec mes deux collègues de l’époque, : « Quand nous sommes face à quelqu’un, l’objectif est de soulager la personne ». Mais pour cela, il n’y a pas une technique ni une approche qui puissent convenir à tout le monde. Nous sommes partis de ce principe-là, c’est-à-dire ne pas se focaliser dans une direction particulière.

Le professeur Leong Kok Yuen était parti justement de ce principe et parlait de ce que l’on appelle l’« Ecole de la voie neutre ». Nous pouvons résumer cela en disant : « Utiliser la bonne technique, la bonne approche, chez la bonne personne, au bon moment ». Si on traduit littéralement « Zhōng Lì », il s’agit justement de la neutralité. « Zhōng », c’est le centre et « lì » est justement le côté neutre. Donc, c’est ne pas s’orienter dans une direction ou une autre spécifiquement au risque d’être limité dans la prise en charge des personnes que l’on peut recevoir en cabinet.

Florent, la formation chez vous, cela se passe comment ? Est-ce du distanciel ou du présentiel ? Cela dure combien de temps ?

F B | La formation de 5 ans que nous proposons est une formation à temps partiel avec des temps de regroupement et du temps de travail personnel. En dehors de ces temps de regroupement, les stagiaires ont accès à une plateforme d’e-learning sur laquelle ils vont avoir accès à des cours vidéo. Ils vont pouvoir revoir, retravaillercertains cours qu’ils ont eu en présentiel. Nous avons également mis en place ce qu’on appelle le « Blended Learning », c’est-à-dire qu’à certains moments nous allons demander au stagiaire, avant une cession de regroupement, d’aller sur la plateforme, d’aller y visionner certains cours en vidéos, de faire quelques exercices, des exercices avec auto-correction pour qu’ensuite en présentiel, le formateur puisse faire une synthèse du cours en question, puisse répondre aux questions des stagiaires et ensuite faire des exercices ou des mises en situation parce que l’idée, c’est ça, c’est transmettre une information, mais surtout développer les compétences. Pour cela, il faut faire des exercices, des mises en situation.

On essaie vraiment d’orienter sur d’une part, un enseignement des connaissances qui est certes, denses mais qui sont vraiment les fondations, les fondements, pour ensuite pouvoir développer l’aspect clinique, l’aspect pratique au niveau de la formation.

C’est vrai qu’on a une étape où au niveau de la formation, au bout de 3 ans, les stagiaires peuvent et doivent même commencer à avoir une certaine pratique à prendre en charge un certain nombre de personnes présentant des situations cliniques relativement légères.

Oui et d’ailleurs, on précise que les stagiaires chez vous doivent faire des stages afin de se professionnaliser véritablement. Je dois vous avouer quelque chose, je suis vraiment novice en termes de médecine chinoise. Tout ce que je connais c’est l’acupuncture. Bien évidemment, je suppose qu’il y a d’autres techniques de soins. J’aimerais bien que vous nous en parler un petit peu.

F B | Oui ! La médecine chinoise regorge de techniques, d’outils divers et variés. Encore une fois avec 3000 ans d’expérience clinique forcément, les médecins ont testé différentes choses comme l’acupuncture qui est effectivement très connue, mais également le massage tuī ná, la pharmacopée chinoise, la diététique, le qì gōng, la moxibustion, les ventouses. Tout cela, ce sont des outils qui peuvent être très intéressants et efficaces, mais qui sont définis par une fourchette d’utilisation avec des limites.

L’acupuncture, aussi intéressante qu’elle puisse être, peut être limitée. D’où l’intérêt encore une fois, d’avoir plusieurs outils dans sa caisse pour pouvoir répondre aux situations cliniques de la personne. Pour cela, on va avoir le tuī ná qui est l’un des grands outils, l’une des grandes techniques de la médecine chinoise. On parle de massage tuī ná. On peut distinguer le tuī ná ànmó qui s’occupe du massage des tissus mous et qui va plutôt travailler au niveau musculaire. On va avoir le zàng fŭtuī ná ou le tuī ná des organes. L’idée est de venir travailler les différentes structures anatomiques. On va avoir le zhèng gǔ tuī ná où là l’idée est de« zhèng », c’est à dire« redresser » et « gǔ », les os. Là, il s’agit d’un ensemble de technique, de mobilisation et de correction ostéo-articulaire. La diététique, qui est un outil qui devrait être notre base pour nous en médecine chinoise. SūnSīmiǎo, médecin du IIIe siècle, prescrivait de la diététique comme premier traitement à ses patients.

Puis, vient ensuite un autre grand outil, qui est vraiment peut-être l’un des joyaux de la médecine chinoise, en Chine en tout cas, la pharmacopée chinoise. Sous ce terme-là « pharmacopée », on va regrouper l’utilisation de substances médicinales d’origine végétale bien évidemment, mais également d’origine minérale. C’est l’une des pharmacopées les plus riches du monde. Donc l’idée c’est d’utiliser différentes substances médicinales, mais pas toutes seules. On ne va pas faire comme en phytothérapie occidentale où la plupart du temps on va utiliser une seule substance médicinale.

Il y a eu utilisation de prescription, d’association de substances médicinales entre elles, qui ont donné naissance à ce que l’on appelle des prescriptions classiques, « jīng fāng » qui sont encore à l’heure actuelle utilisés. Ce sont des associations de 3, 4, 5, 6 plantes. Comme elles ont été testées à travers les siècles, nous avons un véritable recul. Nous connaissons leur utilisation, nous savons dans quel cadre les utiliser, comment les utiliser. Nous connaissons les potentiels effets secondaires, les précautions, les contre-indications à respecter parce qu’elles ont été testées depuis plusieurs siècles sur des centaines, peut-être des milliers de patients à l’époque.

Merci beaucoup Florent. Me voici, un petit peu plus renseigner sur le sujet. Pour finir, j’aimerais que vous nous parliez de vos stages hors cursus qui sont des formations que vous proposez ponctuellement. Est-ce qu’elles sont adressées à tout le monde ou seulement aux professionnels de la médecine chinoise qui souhaiteraient se perfectionner ?

F B | Cela s’adresse plutôt aux praticiens ou stagiaires en médecine chinoise. Quelqu’un qui n’aurait pas eu de formation en médecine chinoise, un médecin, aussi bon soit-il dans la médecine conventionnelle, ne pourrait pas forcément suivre un stage hors cursus parce que ces stages que nous proposons s’appuient déjà sur des connaissances de base en médecine chinoise. On a par exemple une formation qui va démarrer à partir de novembre prochain sur la psychologie et médecine chinoise. Là, ça s’adresse à partir d’un niveau de quatrième année en médecine chinoise même plutôt à destination de praticiens déjà installés en cabinet. À côté de cela, on va avoir une autre formation, un autre stage hors cursus début septembre, qui va s’adresser à des stagiaires en fin de première année, début de deuxième année. Cela dépend du contenu. Mais à chaque fois quand même, il y a un niveau de connaissances de bases à avoir en médecine chinoise.

Et bien, je ne sais pas pour vous, mais moi Florent, vous m’avez donné envie de découvrir un peu plus la médecine traditionnelle chinoise. Merci beaucoup, Florent !

F B | Merci à vous !

On était donc en compagnie de Monsieur Binon, co-directeur de l'École Zhōng Lì à Aix-en-Provence, qui forme des praticiens en médecine chinoise. C’est la fin de ce podcast, mais on se retrouve très vite pour un autre « On en parle »